Quelque chose à étouffer [Jason]

Un appel, il est à peine 9 heures du matin. Dans son appartement confortable et en charmante compagnie, Serge reste allongé et attend le répondeur. La sonnerie du téléphone lui brise le crâne, la bringue d’hier était plutôt costaude. Le répondeur s’enclenche alors, une voix mystérieuse, parlant en russe et inquiétante résonne dans l’appartement. Serge bondit du lit, fût il nu comme un ver.

« Bonjour Helvitch, venez au « Irkoutsk », entrez par les cuisines, merci. »

Le téléphone s’éteignit. Serge enfila un caleçon, la jeune femme dans son lit se réveilla à son tour. Il se montra indifférent envers elle et alluma une clope, la première, avant manger, ça réveille bien. Sans rien dire, il part se doucher, le regard sombre de la jeune femme en dit long sur son état d’esprit mais c’est bien le dernier de ses soucis que de subvenir aux besoins d’une fille. Il s’habille, se coiffe, enfile sa veste dans un temps record et sort de la pièce. Il revient et attrape ses clés.

« Allez dégage ! »

Dit il irrespectueusement à la jeune femme encore nue dans son lit. Le regard de Serge redevint glacial et particulièrement persuasif. Il s’empare de son arme de poing ce qui déclenche la panique chez la jeune femme. Serge le cale dans sa veste, il n’allait pas descendre une jeune fille innocente, qui n’est même pas une prostituée en plus. En tout cas, l’arme l’a décidé à se lever, s’habiller et à se tirer en silence devant un Helvitch soulagé et satisfait et affiche un grand sourire. Il attend de pouvoir la voir traverser la rue avant de s’emparer de son téléphone. Il compose un numéro.

« J’arrive. »

Dit il rapidement et sans attendre de réponse, il raccroche. Il quitte sa maison et embrasse une icône de la Vierge dans l’entrée. Il ferme la porte et descend les escaliers en quatrième vitesse. Il ira à pied jusqu’au restaurant qu’il contourne pour passer par la porte des cuisines, à proximité des poubelles. Il toque plusieurs fois à la lourde porte, un type entrouvre la porte, l’observe et le laisse entrer. Serge s’engouffre dans le bâtiment, la porte se referme. Serge traverse alors les cuisines, des cuisiniers s’afféraient ici et là à préparer une centaine de petits-déjeuners, comme tous les matins. Le mafieux se dirige vers une porte sur la droite menant à la cave à vin. Descendant les escaliers glissant jusqu’à la cave, il trouve attablé là, trois hommes de la mafia, trois grands pontes du clan local. Ils ne sourient pas, ne parlent pas, l’un tient un journal et un autre a sa main posé sur une valise déposée sur l’unique table de la pièce. Serge les rejoignit, leur faisant la bise, ces gens étant respectés …

« Quel est le problème messieurs ? »

Lança t-il naïvement à l’un d’eux. Celui au journal, un dénommé Manvarolitch, magnat de la presse dans la région, balança le journal sur la table.

« Sur la page 10, des flics enquêtent sur nous. »

Inquiet et surprit, Serge se rua sur le journal à la page indiquée alors que les trois mafieux croisèrent les bras. Helvitch lut attentivement l’article. Après plusieurs mois d’enquêtes, la 55 Lincoln, la section qui a tendu une embuscade à Serge lors du quadruple homicide dans le quartier italien, affirme que la mafia russe est derrière tout ça. Ils ne citent aucun nom. Le mafieux à la valise, Elvis Prangtov, un vieil ami de Serge, déclama alors avec une voix inquiète.

« Ils vont beaucoup trop vite et trop loin. Une plainte contre X a déjà été déposée et l’affaire est prête à passer devant les tribunaux. »

Un autre enchaîna.

« Cette action ne doit pas décrédibiliser notre organisation, pas sur une vulgaire affaire de meurtre. Vous devez arranger ça Helvitch. »

Entouré par ses trois mafieux, Serge se sentit un moment fautif et coupable. Pourtant il se ressaisit.

« Je vous écoute. »

Dit il simplement. Prangtov ouvrit alors la valise qui contenait des documents. Le clan russe de Karandras fonctionnait toujours de cette façon, beaucoup de paperasse et de documentation. Serge s’approcha du contenu, les flics avaient tous un fichier, de même qu’un petit avocat du nom de Jason Fox. Le mafieux se saisit d’ailleurs de cette fiche munie d’une photo prise par un informateur.

« C’est qui ce rigolo ? »

« C’est un petit avocat à Karandras, sa réputation n’est pas grande donc aucun soupçon, je pense qu’avec quelques billets il sera simple de monter une affaire pour étouffer cette affaire. »

Serge n’en revenait pas que le clan ait prit soin de faire confiance à un avocat de troisième zone alors qu’ils sont déjà en contact avec les meilleurs de la région.

« Je vais réellement mettre ce type dans la confidence ? Avec quel argent ? »

« Une deuxième valise se trouve sur votre table habituelle dans la salle des repas, invitez le à manger pour ce midi et concluez un accord. Vous avez carte blanche. Vous avez ici son dossier et son numéro de téléphone. Je ne doute pas qu’il sera content de recevoir 15.000 $ pour cette affaire. »

Serge referma la valise, gardant juste sur lui le papier sur lequel était écrit le numéro de téléphone de l’avocat. Il remonta les escaliers, pas très rassuré par cette mission. Il ouvrit la porte à double-battant des cuisines pour arriver dans la pièce principale du restaurant luxueux. Sur sa table habituelle, une valise, un café et le « Washington Post ». Il se pose ici, comme tous les matins. Le ballet de serveurs commença pour servir les petits-déjeuners tandis qu’Helvitch se saisit de son téléphone et inscrit le numéro de l’avocat dans le combiné. Ça sonne …

Jason marchait, dans les rues avoisinant le Palais de Justice. Il réfléchissait à l'affaire Juanez. Normalement, c'était réglé. Il lui manquait juste de payer une pute, avec des gamins, pour qu'elle joue le rôle de la femme de Pablo. Trouver un médecin serait plus dur, mais cela devrait être faisable. Un paumé avec une licence de médecine suffirait. Il allait pouvoir trouver cela dans les bas-quartier, du moins il l'espérait fortement. Jason traversa une route, et s'arreta devant un café. Plongeant sa main dans sa veste de costard noire, il en sortit son paquet de cigarillo, et en alluma un. Il tira une latte, expira l'air, tout en observant la ville autour de lui. Karandras possédait vraiment une atmosphere.. particulière. Mais cela lui plaisait. Tout d'un coups, son portable vibra, dans sa poche. Il en était fier. La machine valait son paquet de dollars. Le numéro, par contre, était inconnu. Jason tira une nouvelle latte, tandis que son portable lancait une nouvelle salve de vibration, qui semblait carresser sa peau, au travers du fin et couteux tissus. Le jeune avocat décrocha de la main gauche, et lanca un nonchalant 'allo' auquel une voix tranchante répondit, avec un léger accent... Russe, visiblement, ou du moins un gars qui venait d'un pays de l'Est.

"Rendez vous au Irkoutsk, à Little Odessa. Nous avons besoin de vos services. J'aurais un café, et le washington post.."

Des paroles directes, claires et précises. Presque.. un ordre. La voix d'un homme qui décide, qui prends des décisions. Pas un homme qui se tromperait de numéro.

"J'arrive."

Jason avait toujours su adapter son discours à son auditoir. C'est ce qui faisait de lui un excellent orateur, et un bon avocat.

"Très bien."

Son interlocuteur raccrocha aussitot. Jason rangea lentement son portable, pensif. Il cracha un nouveau volute de fumée, et fit un léger sourire. Les affaires reprenaient. A vrai dire, il appréhendait légèrement. Mais il n'avait encore donné à personne de raisons de l'éliminer. Alors il n'était pas trop inquiet. Jason marcha un peu dans la rue, et acheta le journal à un gamin, dans la rue. Puis, il monta dans un taxi. Le chauffeur se tourna vers lui, grattant une barbe de quelques jours, l'air décontracté.

"J'vous emmène où?"

" Au Irkoutsk, Little Odessa."

L'homme se décomposa, mais ne dit rien, et démarra. Le silence fut maître durant le trajet, Jason réfléchissant à moult chose, sans vraiment penser à quelque chose en particulier.

"Vous êtes arrivé.."

"Merci."

Jason régla la course, sans un mot de plus, et observa le luxueux restaurant. Un bien bel établissement? Mais ca sentait la corruption à plein nez. C'est donc en souriant que le jeune homme entra à l'intérieur du bâtiment. Il sentit posé sur lui plusieurs regards, mais ne s'en soucia pas. Il venait de repérer celui qui avait du l'appeler. Un barbu, buvant son café, lisant le Washington post. Jason, lui tenait un exemplaire d'un journal parlant de la bourse, de ce genre de chose. Rien de passionnant. Il prit place face à celui qu'il espérait être son client.

"Je suis là.."

[Petit rp .. on cause ^^]

Il avait parlé très brièvement comme d’habitude, il ne s’était même pas présenté mais comptait sur son accent russe et son ton autoritaire pour faire débarquer rapidement ce petit avocat des bas quartiers. En raccrochant, il hocha la tête en direction du serveur de l’entrée qui devait filtrer les entrées. Il reprit alors la lecture de son journal avec son café noir. Il n’attendit pas bien longtemps finalement. La porte s’ouvrit, Serge ne lança pas un regard vers cette dernière mais le serveur de l’entrée laissa échapper une légère quinte de toux, il s’agissait du signal de l’arrivée du contact. Serge lança un bref regard furtif sur le type, le dévisageant de haut en bas alors qu’il approchait de la table. Lorsque ce dernier prit place en face de lui, Serge ne lui lança pas le moindre regard ni le moindre mot, il restait plonger dans la lecture d’un article, laissant poireauter l’avocat pendant plusieurs minutes dans un silence complet.

Helvitch referma enfin son journal, ne cherchant pas à cacher ses nombreux tatouages sur ses mains. Il fixa un instant l’avocat avant de claquer des doigts. Un serveur accourut rapidement. Le Russe effectua un « deux » avec ses doigts, le serveur disparut.

« Monsieur Fox. »

Serge hocha la tête d’un air perplexe, il n’en revenait toujours pas de parler à un type aussi peu réputé dans cette ville. Il desserra un peu le col de sa chemise. Le serveur réapparut posant deux petits verres de vodka sur la table, il débarrassa ensuite Serge en lui soutirant son journal et son café.

« Nous connaissons votre petite réputation. C’est pour cela que nous cherchons à travailler avec vous. Comme vous le voyez nous avons de l’argent, êtes vous prêt à travailler pour nous sur cette affaire. »

Il préférait obliger l’avocat à accepter l’affaire sans qu’il la connaisse pour ne pas risquer de dévoiler un quelconque plan de la part du clan russe. S’il refusait, il perdrait de l’argent et les mafieux du temps, ils prendront un autre avocat, pas de soucis.

Jason appréciait la tension qui l'habitait. Il gardait son calme, mais il n'était pas tout à fait à l'aise. Il pouvait très bien se faire descendre. Et on n'entendrait plus jamais les plaidoyers d'un bel et brillant jeune homme, doué pour son métier. C'est pourquoi il attendit, calmement, que Serge prit la parole. L'avocat prit le verre qu'on lui apporta. De la Vodka. Pure ou mélangée, il l'adorait. Son alcool préféré, à vrai dire. Il la porta lentement à son nez, et un bref sourire apparut sur ses lèvres, tandis que les vapeurs d'alcool lui promettait un plaisir proche. Serge parlait, lui faisant comprendre qu'on avait besoin de lui pour une mission difficile, certainement illégale. Et donc discrète. Exactement ce qu'il appréciait. Sortant lentement son paquet de cigarillos de la poche interne, et sortit un de ses petits délices. Légèrement parfumé à la vanille, il les avait volé à son père avant de le quitter. Provenant de la Havane, ils étaient de très bonne qualité. Mais il ne lui en restait que peu. Tout en faisant cela, il choisissait lentement ses mots. Faisant donc attendre Serge. Moins longtemps qu'il n'avait lui même attendu; mais ainsi, il se plaçait au même niveau que son interlocuteur... Puis, lentement, il prit la parole, d'une voix ferme et maitrisée.

"Je suis prêt à travailler, si l'on me paye."

Jason alluma son cigarillo à l'aide d'une allumette. D'un hochement de tête, il désigna le paquet encore ouvert à Serge, l'invitant à se servir.

"Et vous découvrirez que ma réputation n'est pas le reflet de mon talent. Je suis efficace, et particulièrement doué pour ce que je fais."

Une gorgée de Vodka. L'alcool brûlant libéra des saveurs rares pour un liquide de ce genre; c'était de la bonne qualité. Il grimaça légèrement, mais ses traits se détendirent à nouveau assez rapidement.

"Que devrais-je faire ?"

Ce type venait d’accepter. Après tout, au moindre écart, sa mort passera rapidement inaperçue, et puis les avocats du clan se chargeront bien de cette mission, certes avec beaucoup plus d’argent. Serge continuait d’observer l’individu avec perplexité. Lorsqu’il lui tendit le paquet de cigarillos, il le prit pour le refermer et attrapa de même celle de l’avocat encore sur sa bouche et l’écrasa.

« On ne fume dans cette partie du restaurant. »

Il garda l’objet en main et claqua du doigt pour appeler un serveur. L’un arriva, Helvitch déposa le cigarillo dans sa main avant de le voir disparaître. Il n’était en aucun cas interdit de fumer dans cet endroit mais le mafieux espérait montrer qui devait rester le maître de la situation ici. Il posa ensuite le paquet devant son propriétaire légitime et termina sa vodka. A peine terminé, le mafieux redevint plus amical.

« Vous gagnez quoi 2.500 à tout casser. Je vous offre de tripler votre salaire rien que pour cette affaire … 7.500, en liquide. »

Un avocat de ce calibre n’aurait pas les couilles de négocier avec le mafieux qui joue ici à domicile dans le restaurant de son frère avec ses hommes, ses amis, son pognon et son flingue qui restait planqué dans une poche intérieure de sa veste. Il acceptera l’argent et après seulement il sera mis au courant, pas dans cette salle. Serge restait un homme prudent, même envers ceux qui ne méritaient pas son respect. Dans le même temps, il réfléchit à ses tournures de phrases pour lui expliquer la situation. En effet, il ne le mettra pas non plus au parfum de tout, c’est une affaire bien trop grosse, il ne parlera jamais du clan, jamais du coupable, juste du fait qu’il faille étouffer cette affaire.

Jason fixait Serge, tâchant de rester impassible. Ce dernier venait de l'empêcher de fumer, affirmant que l'on n'en avait pas le droit dans cette partie du restaurant. C'était sûrement faux, mais l'avocat n'était pas en position de contester. Et ce type le savait. Il menait parfaitement la danse. Il l'avait fait accepté la tâche sans rien lui dire sur ce qui l'attendait, et il visait maintenant à lui faire accepter son salaire. Toutefois, il dévoila aussi qu'il avait étudié son dossier. 2500 dollars était son salaire, net et précis. Bref, tout était calculé, et cela ne surprenait vraiment pas Fox. Ce dernier continuait d'écouter Serge, sans un mot, réfléchissant intensément. Puis, lorsque ce fut à son tour, il reprit lentement la parole.

"Vous ne m'avez toujours rien dit de ce qui m'attends..."

L'avocat se cala dans sa chaise, lentement, attrapa son paquet de cigarillos et le rangea dans sa veste. L'expression de son visage était figée, les traits tendus, les lèvres serrées. Il termina sa vodka d'une traite, et cela le détendit un petit peu.

"J'en déduis que c'est un travail dangereux. Offrez-en moi le double, et quelques bouteilles de cette vodka... et j'irais jusqu'au bout."

Un petit sourire. La vodka, c'était inutile, mais elle était vraiment bonne. Alors bon.. Quand aux 15000 dollars... Une belle somme, mais pas un nombre rare pour une grosse affaire, surtout pour un avocat. Et, Jason le savait, certains de ses... 'collègues' demandait beaucoup plus cher.

"Ou alors, allez voir un autre avocat, qui vous demandera sûrement bien plus cher, et qui n'osera pas aller jusqu'au même extrémités que moi.."

Voilà. Maintenant, soit il se prenait une balle, soit il allait enfin pouvoir commencer à vraiment travailler. Ce dont il avait hâte...

Un serveur s’approcha avec de la vodka, Serge lui lança un regard noir, lui faisant rebrousser chemin. Il n’avait pas apprécier la réaction de l’avocat, il fallait lui faire comprendre et pourquoi en lui montrant qu’il n’était pas un petit caïd de rue qui cherche à se faire réduire une amende ou éviter une peine de prison. Il serra ses poings, bien en vue sur la table pour lui montrer ses tatouages, forçant l’avocat à déduire de lui-même à qui il avait à faire. Le regard perçant et toujours fixé sur le misérable avocat pourri, Helvitch lança un sourire dédaigneux.

« J’ai déjà plusieurs avocats qui me prendront cette affaire à 7.500, là n’est pas la question Monsieur Fox . La question est de savoir si vous voulez travailler pour moi pour une somme raisonnable. »

Il aurait clairement voulu lui forcer la main, le forcer à accepter les 7.500 billets en le menaçant subtilement du genre « La question est de savoir si vous voulez avoir un appartement ou une main droite » etc etc … mais on ne parle pas à un avocat comme on parlerait à une de ses racailles de latinos ou d’afros qui bouffent leurs propres merdes et redemandent des allocations à la fin du mois.

« Il est vrai que l’affaire est assez corsée Monsieur Fox. »

Il s’approcha de l’avocat et d’un geste de main, dépoussiéra le col de la veste de Jason. Il recula ensuite avec un large sourire.

« On va couper la poire en deux Monsieur Fox. »

Le sourire disparut du visage du mafieux.

« 12.000 $ ou vous allez vous faire foutre Mr Fox. »

La patience du mafieux avait ses limites et même avec des ordres, Serge n’était pas prêt à se faire marcher les pieds par ce misérable avocat qui se la joue cool et beau gosse. S’il ose encore prendre Helvitch pour une vache à lait, il se retrouvera facilement avec une balle dans la tête. S’il se tirait, le mafieux lui enverra la « Mante » ou ses hommes pour s’occuper de son appartement, de son visage ou de sa réputation. Toutes les cartes sont entre ses mains.

"Je suis votre homme."

Jason aurait pu continuer à marchander, pour augmenter son salaire. Mais il avait affaire à un homme de la mafia russe. Les tatouages de son interlocuteur étaient suffisamment clair pour lui; il ne prit pas le temps de les détailler, mais il connaissait la signification de certains d'entre eux. Il avait toujours été curieux de tout, à l'université, et il s'était un peu interressé à la Russie, sa mafia..

"Копейка рублю бережет"

Son accent n'était pas excellent, mais on reconnaissait les paroles.

"Un sou est un sou. Les kopecks font des roubles, en russe. Un de mes proverbes préférés."

Jason ne souriait pas, observant Serge. Ce dernier semblait être du genre à s'énerver, mais à ne pas trop le montrer. Un homme certainement machiavélique, intelligent, rancunier, et manipulateur. Ils avaient donc quelques points communs.

"Et si nous allions discuter ailleurs de ce pourquoi vous m'avez fait venir ?"

L'avocat se tut, attendant la réponse de Helvitch, près à le suivre.

Enfin une parole censée dans la bouche de cet avocat. Son accent russe était plutôt proche de la bouillie mais Serge compris parfaitement, il lança un geste de main, attirant un serveur vers la table qui apporta deux verres et une bouteille. Serge les remplit avec toute la précision et la rapidité d’un vrai russe. Il faut toujours remplir vite son dé à coudre de vodka pour conserver toute la puissance de cet alcool. Discrètement, il porta un toast avant de vider son verre.

« Il y a une tradition ici, Monsieur Fox. »

Dit il avec un large sourire avant de lancer avec force le verre sur le sol. Cette tradition se retrouvait dans la tradition juive puis dans la civilisation russe des villes proches du Transsibérien comme là où a vécu toute la famille Helvitch très fortement influencée par ces rites. Le serveur exaspéré repartit en cuisine, il savait bien que le mafieux coûtait cher en verres cassés pour le restaurant. Il se leva, tendant une valise à l’avocat mais avant qu’il puisse l’ouvrir, il la posa bruyamment sur la table, l’ouvrit vers Fox.

« J’espère que vous me faîtes confiance, j’ai pas trop envi de compter tout ça. Nos patrons sont prêts à vous fournir beaucoup d’argent pour notre affaire. »

Sans attendre, il soutira deux liasses de billets. Il les dissimula dans sa veste.

« Excusez mais cette valise contenait 15.000 billets Monsieur Fox. »

Il referma rapidement la valise et la tendit à l’avocat et une fois qu’il l’eut dans les mains. Lui intima de le suivre. Un serveur reparut dans la salle avec un balai pour balayer les restes des verres. Serge le fit monter au premier étage et ouvrit une porte capitonnée. Il s’installa dans cette chambre sur un beau fauteuil en cuir rouge. L’ambiance de cette pièce rappelait celle de la salle, cosy, rouge, généreuse, ensoleillée, le vrai bonheur en tout point.

« Je vous en pris Monsieur Fox. »

Lui indiquant une chaise.

« Avant que nous en venions au fait. Vous pouvez encore renoncer, c’est notre dernière offre. »

[Post court, désolé]

Jason avala son verre de la même façon que Serge. Il n'était peut-être pas Russe, mais il était un buveur de vodka, en tout cas. Il jeta le verre par-dessus son épaule, sans prêter attention au serveur. Puis, Serge ouvrit la valise, et lui montra son contenu.

"Je ne fais confiance qu'à moi-même. Mais je pense qu'il y a le compte."

Helvitch retira deux liasses de la valise, expliquant qu'elle contenait originellement 15 000 dollars. Jason comprit alors qu'il avait eu raison de faire augmenter les prix. Puis, le jeune avocat se leva, et suivit son interlocuteur jusqu'à une salle, aux couleurs rouges, respirant le luxe, le bonheur. Il prit place sur la chaise face au russe, et écouta ses paroles.

"Je vous ai dit que j'acceptais, je crois. Je ne reviendrais pas sur ma décision."

Jason se cala sur sa chaise, particulièrement confortable. Il eut un sourire malicieux, avant d'ajouter.

"Peut-on fumer, ici ?"

Les explications plus que douteuses du clan pouvaient dès lors débuter. Avec un sourire encore plus machiavélique que celui du petit avocat arrogant qui cherchait sans doute à se montrer plus gros qu’il n’était, le mafieux ouvrit les bras tout en s’enfonçant un peu plus dans le fauteuil particulièrement confortable de cette chambre.

« Il était interdit de fumer dans ce restaurant ? J’étais pas au courant … »

Tout ici n’était qu’une démonstration de force de la part du mafieux, il fallait montrer à ce blanc-bec que la Loi n’est d’aucun secours ici dans ce restaurant et encore moins dans cette chambre aux murs insonorisés. Afin de clarifier le moindre malentendu, Serge enleva son arme de poing de son veston et la posa sur le bureau, à portée de bras.

« Très bien. Alors restez assis et taisez-vous. »

Serge ne savait pas très bien comment clarifier cette affaire, surtout envers un petit avocat de quartier, lui qui se considérait, sûrement à juste titre comme un gros poisson dans cette misérable ville de crime.

« Nous avons une triste affaire à étouffer Monsieur Fox. La police de Karandras a porté une plainte contre X concernant une détestable affaire d’homicide. L’unité s’appelle la 55 lincoln. Voici le topo. »

Il reprit son souffle, les 12.000 billets donnés à ce type seront perdus ou bien ils récupéreront la mise.

« Nous avons déjà influencé le procès. Vous devenez l’avocat de la défense. Montez tout ce que vous voulez, fausses preuves ou objets compromettants, je veux tout Monsieur Fox. »

Il devait terminer par une notre subtile.

« On gagne, vous profiterez de vos 12.000 billets. Mais si l’affaire s’étend, je vous promets la torche humaine. Des questions ? »

Serge n’aurait aucun scrupule à le liquider sachant bien qu’il ne pourrait échapper au clan russe de Karandras, comme de nombreuses vermines avant lui.

"J'imagine que vous préférez ne pas faire usage de la violence... Sinon je ne serais pas là."

Jason était plus que sérieux, à présent. Il était tout autant excité qu'intéressé par l'affaire qu'on lui proposait. Il aimait travailler, et bien, tant que possible.

" J'avais entendu parler de cette affaire. Un de mes collègues, si je ne me trompe pas, la suit d'assez près. Mais pas de nôtre côté. Il n'est pas obligé de savoir que je travaille dessus... Je garderais un œil sur leur résultat."

Comment s'appelait-il, déjà ? Huijven, ou quelque chose comme cela. Un autre avocat, jeune, arrivé pas longtemps avant Jason. Mais surtout, c'était un de ces types qui croit en la Justice, et l'égalité entre homme.. Un perdant, en somme.

"Pour les flics.. Je vais me débarrasser d'eux, et légalement, en plus. J'aurais peut-être besoin de vous."

Jason sortit un cigarillo de sa veste, et l'alluma. Cela faisait du bien. Ce type, face à lui, s'était foutu de lui. Il allait lui montrer qui il était, maintenant. Le jeune avocat se pencha un peu vers Serge, comme s'il voulait être mieux entendu.

"Le meilleur moyen pour que ces flics vous lâchent, c'est de leur faire perdre leur boulot, où qu'ils soient trop mis en doute pour qu'on les laisse monter un dossier. Pour cela, rien de plus simple, du moins en théorie."

Le jeune homme se tut un instant, avant de reprendre.

"Une photo de l'un d'eux, marié, avec une pute. On retrouvera de la drogue, chez un autre. Un troisième sera pris en photo avec un homme de chez vous, par exemple."

A nouveau, une petite pause, avant de reprendre, plus lentement.

"Par la suite, je fournirais un dossier fournis au Procureur, et, s'ils parviennent au procès tout de même... Ils ne gagneront pas l'opinion du Jury.. Mais j'aurais pour cela besoin de vos hommes, et filles... Est-ce que je l'aurais ?"

Faire usage de la violence ? Ce n’était absolument pas exclu. D’ailleurs cela restait la dernière option, si l’avocat échoue, Serge se chargera de liquider ce Monsieur Fox et ces hommes se chargeront de faire pression sur les jurés, en leur cassant quelques bras ou quelques voitures, etc etc … mais il est vrai que le mafieux préférait gagner ce procès sans violence, cela donne plus de légitimité et de pouvoir. Il n’aima guère le ton de l’avocat mais en la matière il s’avéra peut être plus expérimenté que le mafieux.

Serge sortit une cigarette de son veston et l’alluma avec son sublime briquet. Il cracha sa fumée vers le haut pour ne pas paraître désagréable et pointa du doigt l’avocat.

« Je vous offre les services d’un de nos hommes et je me charge de vous envoyer des filles. Combien ? ah oui j’oubliais. Vos 12.000 $ serviront à les payer Monsieur Fox. »

Encore une fois, il niquait bien celui qui recevait l’argent.

« Mais je vous fais crédit. Si l’affaire marche vous ne payez pas les frais, sinon vous raquez tout. Vous m’avez comprit Monsieur Fox ? Contactez le restaurant si vous désirez me parler, pas plus d’une minute de conversation et ne m’appelez jamais par mon prénom ou mon nom, je m’appelle Eric Makavolitch. »

Serge était plutôt pressé, ou du moins en apparence. En tout cas, il se leva et invita l’avocat à en faire de même. Le mafieux jeta un dernier regard sur sa monte, il attendait de la visité, une jolie fille du nom d’Alexia, la fille qu’un gros bookmaker. Il avait obtenu un rendez-vous avec cette créature de rêve et ne voulait pas tellement être en la compagnie d’un petit avocat. Serge l’invita à sortir de la chambre, il referma cette dernière avant de descendre les escaliers en silence et traverser la salle vers la porte d’entrée.

« J’espère que nous aurons de bonnes nouvelles Monsieur Fox. Allait encaisser ça. Vous pouvez commencer dès que vous le désirez. »

Le portier ouvrit la porte. Une sublime jeune femme entra. Dans l’oreille de l’avocat, il murmura juste.

« Je suis très occupé désolé. »

Avant de se détourner de lui et de s’approcher avec un sourire radieux vers la jeune femme. Il lança un geste amical à l’avocat avant de l’oublier complètement pour se fixer sur sa nouvelle cible.

"Cela me convient très bien."

Jason n'avait rien d'autres à dire. Il se leva, suivant Serge, tout en terminant son cigarillo. Il suivit le Russe, écoutant ses dernières paroles. Cet enfoiré continuait avec ses menaces. Il voulait l'entuber à fond. L'avocat pensa intérieurement qu'il allait devoir s'acheter une arme, parce que ce genre de type étaient de ceux qui pouvaient le contacter. Serge attendre de la visite, et, effectivement, une belle femme arriva, pour le voir. Jason, comme à son habitude, décocha un magnifique sourire à la cible de son client, s'attirant un un sourire un peu plus discret en retour. Après tout, sur le physique, il n'avait pas à avoir honte, et rivalisait largement avec Serge. Mallette en main, Jason descendit dans la salle principale du restaurant, et s'approcha d'un serveur.

"Une douzaine de vos bouteilles de Vodka, s'il vous plait. C'est pour emporter."

Quelques minutes plus tard, il avait dans un sac plusieurs des bouteilles de l'excellent alcool dans une main, et une mallette contenant 12 000 dollars dans l'autre. Il s'alluma un autre Cigarillo, et eut un large sourire. Il se sentait heureux, heureux de vivre. Il allait enfin travailler !

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